Défi 2017: (palier n°44= le roman graphique) Au revoir là-haut de Pierre Lemaître, adapté en BD par Christian De Metter.

La lecture de Au revoir là-haut, le chez d'œuvre de Pierre Lemaitre, sous forme de bande dessinée, adapté par Christian De Metter, a été non seulement pour moi une agréable surprise par la qualité talentueuse des dessins mais aussi par la réussite d'intégration fidèle du roman. Le seul regret est qu'il ait été lu et décortiqué niveaux dessins un peu trop rapidement à mon goût.

Le petit plus de cette bande dessinée, et pas question de bouder notre plaisir, est de découvrir au début du roman graphique l'incroyable préface aussi émouvante que puissante d'indignation de Philippe Torrenton. D'emblée, par ses propres mots très imagés, ce dernier, visiblement encore aux confins de "l'après" d'une des guerres les plus meurtrières au début du XX ème siècle en Europe, nous fait toucher de près, avec horreur, ce que fut pour beaucoup les conséquences " de l'armistice ingrat" de la Grande Guerre et par la même occasion, avec son franc-parler littéraire, se fait porte-parole du ressenti général qu'eurent tous ceux qui lurent le Goncourt de 2013. "... Ces deux poux de la paix sont en moi maintenant et pour toujours, je les connais tellement, ils " sont " la guerre beaucoup plus que les poitrails décorés , que les morts " engranités " tellement nombreux qu'ils ne veulent plus rien dire, oui la guerre c'est eux, des blessures à jamais. Ensemble, ils vont se venger de la paix par son talon d'Achille [....] : la glorification des martyrs... " ( Philippe Torrenton ).

Les dessins en couleurs tirant souvent sur des tons sombres de Christian De Metter nous content avec peu de dialogues les errances et la vengeance imaginée avec grand art de deux soldats oubliés par l'Etat. Une gueule cassée d'origine bourgeoise, Édouard Pericourt, très doué pour le dessin mais renié par son père pour son homosexualité qui préfère se faire passer mort et se priver d'une pension à laquelle il avait droit, devenu accro aux morphine et autres opiacés interdits, et Maillard, un homme simple qui avait toujours été considéré benêt par son entourage et surtout par une mère castratrice, passé injustement en cour martiale, devenu le protecteur et l'infirmier de ce nouvel ami qui l'avait sauvé. La raison ou l'origine de cette misère humaine, d'être oubliés par un État aveuglé, était de s'être retrouvés par hasard tous deux témoins de meurtres commis par le lieutenant Pradelle le dernier jour de guerre dans le seul but de devenir capitaine à l'armistice. Au travers des dessins riches en émotions, nous découvrons avec un emmêlement de sentiments contradictoires la destinée hors normes de ces trois individus qui chercheront dans l'illégalité, mais limités individuellement par des codes d'honneur, saisir ou convoiter cette part de gâteau offert par un pays qui se veut transfiguré au même titre que ses héros martyrs. Une course contre la montre va s'engager entre l'horrible Pradelle obsédé par l'argent et nos deux doux rêveurs qui ne rêvent que de vengeance...

Quand on a lu le livre, les agissements de Pradelle ne nous fait plus faire des cauchemars, le nez dans ce roman graphique de 168 pages! Durant la lecture du roman de Pierre Lemaître, pour ma part difficile voire impossible à égaliser ou à tenter d'imiter, j'ai dû tordre mes mains jusqu'à la fin, tant le suspense jusqu'au bout était intenable ! Ah, non! Pradelle ne pouvait encore gagner au détriment de nos héros malheureux ! Lire la BD ne peut que vous faire foncer à acheter le roman et le découvrir avec un œil neuf.. Cela ne peut être autrement....